Parole d’expert : Vincent Bachmatiuk, expert en rendu PBR

Vincent Bachmatiuk est spécialisé dans les sciences et technologies des médias numériques, en particulier pour la 3D et en rendu physico-réaliste (prédictif). Il met depuis plusieurs années ses compétences au service de l’industrie de la 3D.

Quels sont les enjeux autour du rendu PBR (Physically Based Rendering) en spectral pour une entreprise ?
Avoir la capacité de créer des images physiquement réalistes dans l’espace de couleur spectral permet de garantir un aspect final, via une image calculée. En fait, c’est de la simulation du comportement des matériaux.

Historiquement, les modèles qui créent de la valeur derrière ces techniques se retrouvent dans le secteur de l’automobile, du luxe, de l’architecture, le design review ou les catalogues produits. Ces préoccupations attirent de plus en plus d’acteurs qui souhaitent aller plus loin dans le rendu d’aspect comme pour le « fashion retail » notamment pour les sneakers, en R&D pour faire le pont avec des outils de simulation orientés optique et les rendus plus classiques en sRGB et bien sûr, plus simplement, pour valider de manière objective les rendus PBR qu’on peut faire en temps réel pour l’AR ou la VR.

En plus de Weta Digital, certains collègues du milieu du VFX commencent à y voir un intérêt, ce qui est assez drôle car les premières publications viennent de la R&D du Cinéma d’Animation. Paradoxalement, certaines industries préfèrent rester sur du rendu non physiquement réaliste pour (sic) des raisons de coût et de qualité perçue.
La variable d’ajustement étant le talent de l’artiste, indépendamment des techniques de rendu : il est rare de trouver des infographistes très « techniques » en rendu et super bons en « artistique ». Il en résulte que le rendu « physiquement réaliste» est considéré comme non artistique. Cette pensée, d’ailleurs similaire à la stigmatisation qu’ont subie les peintres réalistes à la fin du XIXème siècle, est une erreur.

Vous enseignez également dans des écoles d’infographie, notamment Cifap et peut-être bientôt l’université de Limoges. Les outils, les technologies, les techniques évoluent en permanence? Comment imaginez-vous vos cours dans le fond et la forme en 2040 ?
Haha !! J’imagine mes cours digitalisés dans un casque de réalité virtuelle, avec des élèves dans tous les coins du globe travaillant en VPN utilisant les ressources du cloud sur des stations 3D qui ne seront pas plus performantes que votre téléphone portable et moi sur une chaise longue près d’une piscine sirotant un MaïTaï.
Plus sérieusement, les techniques se simplifient en ajoutant des couches d’interface de plus en plus évidentes dans leurs utilisations. Le but est d’éviter de trop se poser de question et de « juste » faire ou créer à l’instar de l’évolution des interfaces de la plupart des softs de création, ceux-là même qui étaient hyper techniques il y a dix ans et deviennent de plus en plus simples d’accès aujourd’hui. Finalement la « 3D » de demain n’aura rien à voir avec la 3D d’aujourd’hui et pour essayer d’avoir un aperçu du processus de création en volume dans le futur, je vous recommande la lecture des cours du Collège de France animé par Marie-Paule Cani, ou de regarder quelques épisodes de Star Trek Voyager…
Le Deep Learning dans la création de contenu est clairement un domaine en plein essor et je pense que, d’ici 2040, ça aura bien changé les règles du jeu.

Vous avez récemment été élu vice-Président du Paris ACM Siggraph. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur cette association ?
C’est un grand honneur pour moi ! J’espère juste être à la hauteur de mes prédécesseurs. C’est un juste de retour des choses que de participer à mon tour à faire en sorte que les événements futurs soient aussi cool et informatifs que ce que j’ai vécu étant étudiant. Siggraph France souhaite promouvoir l’image numérique sous toutes ses formes et sous tous ses aspects, de l’infographie aux techniques interactives, au travers de sa culture et de ses applications. Il a pour but de grouper les personnes ayant un intérêt commun pour la théorie, la conception, la réalisation et l’application du graphisme numérique et des techniques interactives (en sciences, ingénierie, médecine, exploitation des ressources, commerce, industrie, éducation, art et autres domaines) dans le but de faciliter la communication et la compréhension entre l’homme et la machine).

Crédit de l’image du header : Vincent Bachmatiuk